A quel moment le syndrome de la page blanche est-il un manque d’inspiration ou un manque de travail ?
J’échange souvent sur ce sujet avec les auteurs en herbe que je côtoie. A force d’entendre qu’ils n’ont pas eu (pris) le temps, que les mots ne sont pas venus, qu’ils sont restés bloqués… je me demande à quel niveau ils situent leur seuil d’abandon.
Ont-ils VRAIMENT assis leurs fesses sur la chaise ? Combien de minutes sont-ils restés prostrés face à l’écran ou la feuille ? Posent-ils au moins leurs doigts sur le clavier ou leur stylo sur le papier ? J’en viens à douter. Pourquoi ? Parce que comme tout dans la vie, et encore plus dans les arts (individuels), il y a un combat à mener pour arriver à son but et c’est la que la « sélection naturelle » opère.
S’il arrive évidemment d’être dans le dur et d’avoir l’impression de ne pas avancer, ma conviction demeure qu’en faisant, on casse les doutes et les barrières. « Faire » ne signifie pas toujours « bien faire », mais veut aussi dire « reprendre le contrôle », et mon pari est qu’à force de « faire », on parvient petit à petit à maîtriser ces instants de doute et de page blanche.
Si on fait un parallèle avec le sport, on peut être inscrit dans une salle et ne jamais s’y rendre par flemme, peur d’avoir mal, ne pas savoir par quoi commencer ni comment s’y prendre et ainsi de suite… la solution reste la même : faire ! Ne pas trouver d’excuse et pratiquer, comprendre ses propres rouages pour avancer.
Au fil des ans, j’ai remarqué une expression très utilisée par ceux qui ne dépassent jamais cette étape de difficulté. Lorsqu’ils s’adressent à quelqu’un qui fait, j’entends souvent : « tu as de la chance ». Le message derrière ces quelques mots fait grincer des dents. Là où certains voient de la chance, je n’y vois que du travail, de l’abnégation et une véritable envie de maîtriser son sujet.
Partir de rien, d’une page blanche, qu’elle soit artistique, professionnelle ou autre nécessite plus que la chance, elle requiert un don de soi régulier et de passages successifs d’obstacles en tout genre. Réduire cela à un « bon concours de circonstances », c’est ignorer les sacrifices conçus, les heures perdues, les doutes dépassées. Pour tout ceux qui en sont là, il y aura une récompense : le résultat, qu’il soit à la hauteur des attentes ou non, restera plus vrai et plus concret que celui de ceux qui sont encore aujourd’hui face à leur page blanche.
010446g
13 février 2020 à 16 h 51 min
Il y a les bœufs de labour du champ à emblaver , qui trainent l’araire, puis la herse, puis le semoir… Ceux-là ont l’ambition d’être reconnus. Beaucoup n’auront pas la « chance » de dépasser un petit cercle malgré tous leurs efforts.
Il y a ensuite les adeptes de la fulgurance qui parfois n’écrivent qu’un livre, qu’un article, qu’un texte de temps à autre, non pas pour être lus, mais pour se délivrer de ce qui les encombre…
Dernière publication sur le radeau du radotage : Piscine à l'école
Bibliophage
14 février 2020 à 17 h 26 min
C’est très joliement dit !